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Parcours de création : Noémie Goudal, photographe

L'Atelier de Sèvres fête ses 40 ans. 40 années au service de la création contemporaine, dans tous les domaines de l'art et du cinéma d'animation. 40 promotions d'élèves devenus aujourd'hui des artistes reconnus en France et dans le monde entier. Découvrez les portraits de ces anciens élèves qui font aujourd'hui la valeur de notre établissement.

Noémie Goudal, photographe, élève de l'Atelier de Sèvres en 2002

Entretien réalisé par Nadine Vasseur

Des Rencontres d’Arles à Séoul, du BAL à Paris à la Photo Fair de Shanghai, en passant par l’Arizona ou la Suède, Noémie Goudal expose à travers le monde ses photographies énigmatiques mettant en scène d’improbables compositions architecturales, géomorphiques ou cosmiques : ellipses, tours, escaliers, rocs… qu’elle place dans des paysages vides de toute présence humaine. Ces compositions sont réalisées à partir d’installations éphémères, le plus souvent en papier, qu’elle place, à seule fin de les photographier, dans des étendues désertiques, à la surface de l’océan ou dans la jungle tropicale. Ainsi que le laissent entendre beaucoup des titres de ses séries : Telluris, Observatoires, Satellites, ses œuvres interrogent le rapport de l’homme à la nature, aux astres, à la géologie. Elles jouent en même temps à brouiller les frontières entre la nature et l’artifice, l’onirique et la trace de la main de l’homme, en l’occurrence de l’artiste laissée partout visible à dessein, dans les plis du papier, les imperfections de l’installation ou les marques de cordes ou de câbles. Entre illusion et artefact, précision dans la construction et dimension poétique, les œuvres de Noémie Goudal désorientent le spectateur. « C’est cette désorientation que je recherche. Les photographies sont en général associées à une géographie donnée, datées de manière précise. Moi, je fais au contraire en sorte qu’aucun de ces repères ne soit donné au spectateur pour qu’il les imagine lui-même et devienne le protagoniste de l’image. » L’effet est d’autant plus troublant que, pour l’essentiel, ses photographies sont en noir et blanc et donnent souvent le sentiment d’être des études ou des images d’archives.

Noémie Goudal a découvert la photographie un peu par hasard lorsque, encore lycéenne, une amie lui propose de s’inscrire avec elle à un atelier de photographie de la Ville de Paris, le mercredi après-midi. « Plus tard, j’ai pris l’option Arts plastiques au baccalauréat, mais mon frère qui enseigne les arts plastiques à l’université a trouvé le dossier que je voulais présenter aux examinateurs, totalement nul. Il m’a dit «  Tu devrais plutôt leur montrer tes photos. » C’est ce que j’ai fait. Et les petits points que celles-ci m’ont fait gagner m’ont permis de réussir au Bac ! C’est alors que je me suis dit que la photo, je savais faire ! »

Quand Noémie Goudal s’inscrit après le Bac à l’Atelier de Sèvres, elle est encore indécise.« Je savais que je voulais travailler dans l’art mais pas forcément être artiste, je pensais à faire peut-être de la médiation ou de l’événementiel. Mais un professeur de lycée m’avait dit que « mettre la main à la pâte » me serait tout de même utile. En arrivant, je ne savais pas faire de nu, je ne connaissais rien à la perspective ni à l’art contemporain. A l’Atelier de Sèvres, je me suis initiée à toutes sortes d’outils, j’ai aussi appris à parler de mon travail. Toutes sortes de choses qui m’ont été très utiles par la suite. » En fait de mettre « la main à la pâte », Noémie Goudal réussit le concours de Saint Martins School où elle étudie le design graphique. Puis elle intègre le Royal College of Art en section photographie. « Ma chance est qu’à l’exposition de fin d’année, mes photos étaient très bien placées, juste à l’entrée, il était impossible de les louper. C’est ainsi que j’ai été remarquée par plusieurs galeries dont Edel Assenti avec laquelle je continue à travailler. Et puis, tout s’est passé très vite. J’ai rapidement vendu et l’été suivant, j’exposais déjà. » Noémie Goudal rejoint aussi bientôt à Paris la Galerie des Filles du Calvaire. Et en 2013, elle remporte le prix HSBC pour la photographie. Elle est actuellement en résidence à La Manufacture de Sèvres où elle travaille à un projet sur les diverses visions qu’ont eu de la terre Aristote, Dante ou Newton.« Pour chacune de mes séries, je fais beaucoup de recherches. Je me suis beaucoup intéressée à l’histoire de la science, à la manière notamment dont celle-ci à modifié notre regard sur la nature, au fil des siècles. Mais aussi à la façon dont les religions, les explorations, toutes sortes de connaissances ont transformé notre perception. »

Depuis quelque temps, Noémie Goudal travaille aussi à de grandes installations, par exemple pour des décors de théâtre. « Pour la mise en scène par Jean Michel Rabeux de La double inconstance de Marivaux, au Théâtre Gérard Philippe de Saint-Denis, j’ai réalisé de grandes structures en trompe l’œil qui donnent le sentiment d’un décor de colonnes. Je prépare aussi une grande installation dans une église qui donnera l’illusion que des bâtiments de papier sont inondés. » Un autre de ses grands projets à venir est celui auquel elle travaille pour la future station du Blanc-Mesnil du Grand Paris, sa première installation destinée à être pérenne.

 

L'auteur
Nadine Vasseur est journaliste et écrivain. Productrice du magazine Panorama sur France Culture pendant quinze ans, elle est, par ailleurs l'auteur de nombreux livres d'entretiens et de livre d'art parmi lesquels " Les Plis" et "Les Incertitudes du corps" parus aux éditions du Seuil. Elle a publié en 2019 "Simone Veil. Vie publique. Archives privées" aux éditions Tohu Bohu.

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