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Parcours de création : Jean Claracq, artiste peintre

L'Atelier de Sèvres fête ses 40 ans. 40 années au service de la création contemporaine, dans tous les domaines de l'art et du cinéma d'animation. 40 promotions d'élèves devenus aujourd'hui des artistes reconnus en France et dans le monde entier. Découvrez les portraits de ces anciens élèves qui font aujourd'hui la valeur de notre établissement.

Jean Claracq, artiste peintre, élève de l'Atelier de Sèvres en 2011

Entretien réalisé par Nadine Vasseur

Jean Claracq est depuis toujours passionné d’images. A 13 ans, il s’intéresse déjà à la peinture du Moyen-Âge, aux peintres flamands du 15ème siècle comme aux italiens de la Renaissance et à l’histoire de la photographie. Il sait aussi depuis l’enfance qu’il veut devenir peintre, peintre figuratif. Pour parler de son travail, il préfère pourtant parler d’image plutôt que de peinture. « J’ai 28 ans et je m’interroge sur le monde dans lequel je vis, un monde où le langage des images n’a jamais été aussi riche, des émoticônes à Instagram », en passant bien sûr par les écrans d’ordinateurs omniprésents dans ses tableaux. « Notre perception, comme l’a théorisé Gaston Bachelard, n’est pas indépendante de la technologie ; par exemple, on le sait, l’invention de la photographie nous a conduits à regarder le monde et la peinture autrement. Qu’en est-il à l’ère des ordinateurs et des smartphones, qu’est-ce que regarder aujourd’hui ? C’est ce que je questionne, entre autres, dans mes tableaux. » 

A l’Atelier de Sèvres, où il s’inscrit en 2011, « parce que c’est l’école qui a le meilleur taux de réussite au concours d’entrée des Beaux-Arts », Jean Claracq étudie la technique du dessin, la gravure, le modelage, la sculpture, tout en se spécialisant d’emblée  en peinture. « Je me souviens d’une atmosphère de travail très intense, on était tout le temps tous ensemble et cela créait une émulation très forte entre les étudiants. Si je suis entré aux Beaux-Arts, c’est grâce à l’Atelier de Sèvres, du fait bien sûr de la qualité de l’enseignement que j’y ai reçu mais aussi parce qu’on nous y apprenait quelque chose d’essentiel, à savoir présenter notre dossier de façon qu’il soit regardé par le jury. Le jury des Beaux-Arts reçoit des milliers  de dossiers, il faut donc pour être admis qu’un dossier soit bon et avant toute chose qu’il soit vu ! ».  Ses chefs d’atelier aux Beaux-Arts, sont Philippe Cognée et Tim Eitel.

Ses débuts au sortir de l’école en 2018 sont fulgurants. Il figure dès cette même année au générique de l’exposition 100% Beaux-Arts qui réunit une cinquantaine de jeunes artistes issus des Beaux-Arts depuis une dizaine d’années. Une autre exposition collective la même année, Artagon, à l’initiative également des Beaux-Arts, renforce encore sa visibilité. Très vite, le marché de l’art s’intéresse à son travail au point de lui permettre de vivre, depuis quelque temps, entièrement de sa peinture. « Cela me donne une certaine sérénité financière. Mais le plus important pour moi, c’est avant tout de faire de beaux tableaux ! » 

Derrière l’apparente simplicité et la matière lisse des images de Jean Claracq, se cache en réalité une peinture des plus savantes. « Cela exige beaucoup de travail pour parvenir à une matière aussi lisse où toute trace du pinceau a disparu ! La trace du pinceau est celle de la subjectivité de l’artiste, l’effacer c’est tendre vers le maximum d’objectivité », explique-t-il.  Mais il s’agit là d’une objectivité trompeuse, qui sème le trouble  et n’est hyperréaliste qu’en apparence. Chaque tableau de Jean Claracq résulte d’un collage mental entre d’innombrables sources visuelles, picturales, photographiques, numériques, et de la conjugaison de différentes perspectives. « J’utilise la perspective italienne pour créer un point de fuite, la perspective photographique pour le jeu qu’elle permet entre le net et le flou. J’ai recours également à la composition médiévale qui part de la droite et s’en va en tourbillon, à la perspective flamande qui modifie la couleur des objets en fonction de leur position dans l’espace. » Sans doute est-ce de cette conjugaison d’éléments, de points de vue diffractés, que naît le fascinant climat d’étrangeté qui émane de ses tableaux.  Mais aucun besoin de connaître leur processus de création ni les références savantes qui les sous-tendent pour en être touchés : les tableaux de Jean Claracq disent quelque chose à chacun de nous de notre monde d’aujourd’hui. « Ce que je cherche, par-delà l’image, c’est à mettre du sens. Quand je peins une barre d’immeubles, par exemple (il y en a beaucoup dans ses tableaux), ce qui m’intéresse c’est de dire l’échec de la modernité. Ces barres ont été créées par des architectes portés par un désir de rationalité, mais les gens n’y sont pas heureux.  Ce que j’essaie d’exprimer, c’est l’échec des Lumières, l’échec de l’humanisme dans notre « post-modernité ».  Les êtres humains, sont rares, presque toujours seuls dans ses tableaux. « Oui, il est possible que quelque chose s’y exprime de la solitude moderne. Mais surtout, je n’ai pas envie de peindre le mouvement, ce qui m’interdit de peindre la ville, la foule, qui sont forcément en mouvement. D’où mes personnages statiques et le plus souvent solitaires. »  Ce que Jean Claracq aimerait le plus aujourd’hui, c’est être acheté par une institution, « non par prétention mais pour que mes œuvres soient visibles par tout le monde, parce que je suis très attaché à ce partage démocratique de l’art. »   

 

L'auteur
Nadine Vasseur est journaliste et écrivain. Productrice du magazine Panorama sur France Culture pendant quinze ans, elle est, par ailleurs l'auteur de nombreux livres d'entretiens et de livre d'art parmi lesquels " Les Plis" et "Les Incertitudes du corps" parus aux éditions du Seuil. Elle a publié en 2019 "Simone Veil. Vie publique. Archives privées" aux éditions Tohu Bohu.

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Samedi 23/03 à partir de 11h.

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